« La mère des batailles », c’est un peu son nom de code dans l’entourage présidentiel. L’adoption de la réforme de la fonction publique prévue ce printemps, risque d’être délicate pour le gouvernement en place. Entre gilets jaunes, mobilisation syndicale et les grands chantiers prévus pour l’année 2019, décryptage des grandes lignes des changements à venir dans le domaine de la fonction publique.
Il faudra faire preuve de prudence pour le gouvernement d’Edouard Philippe sur les reformes de la fonction publique. Aujourd’hui, pas loin de six millions de Français occupent un poste dans ce domaine. Un peu moins de la moitié dans la fonction publique d’état, près de deux millions dans celle de la fonction publique territoriale, et plus d’un million dans la fonction publique hospitalière. La nouvelle mesure qui sera présentée au cours du Conseil des ministres fin janvier, aura pour but de « modifier en profondeur l’organisation du secteur public pour le rendre plus efficace ». C’est ce qu’a rappelé le président Emmanuel Macron lors de ses vœux aux français, le 31 décembre dernier. Dans son programme, le gouvernement souhaite réaliser des économies, assouplir le statut des fonctionnaires et lancer un nouveau système de primes.
LE CONTENU, EN BREF
Généraliser le recours au contractuel
Le gouvernement souhaite étendre davantage ce principe de contrat qui s’échappe du statut des fonctionnaires. Cette volonté signerait la fin de l’emploi à vie en proposant des embauches qui pourront s’étendre sur 5, 10 ou 15 ans. L’émergence de ce statut suscite déjà un débat au sein des syndicats de la fonction publique. Pour beaucoup, encadrer cette situation de contractuel revient à légitimer leur précarité et à introduire dangereusement de la flexibilité dans l’emploi public.
Réduire les effectifs
Pour cela, le plan de départ volontaire sera modifié. L’indemnité de départ volontaire proposera désormais des primes de 24 mois de salaire et la possibilité d’avoir accès aux aides de retour à l’emploi, ce qui n’était pas le cas jusqu’ici puisque les fonctionnaires n’y cotisent pas du fait de leur sécurité de l’emploi. Une pratique usuelle dans le secteur privé, qui a pour nom « rupture conventionnelle ». L’objectif d’ici 2022 est la suppression de plus de 50.000 postes.
Création d’une agence de reconversion
Inspirée de celles des armées (Défense mobilité), elle sera créée au second semestre 2019. Selon Matignon, elle « permettra d’avoir une force de frappe pour accompagner éventuellement des départs volontaires ». Pour Christophe Couderc, secrétaire général de la CGT-Services publics, « Le gouvernement veut mettre en place un plan de licenciement dans la fonction publique. C’est à ça que va servir l’agence de reconversion. Le cap pour l’exécutif, c’est qu’il faut réduire les effectifs. Tout le reste, c’est de l’habillage. Et puis je ne crois pas du tout aux départs volontaires. On peut très bien pousser un agent à s’en aller. Quand on ne vous donne plus les moyens humains, financiers, matériels pour faire votre travail, vous n’avez qu’une envie : c’est de partir. C’est une mobilité subie. ». Ces réformes structurelles vont être dotées d’un fond d’accompagnement de 50 millions d’euros pour l’année 2019. Il financera les indemnités versées aux agents et les mesures d’accompagnement des mobilités fonctionnelles et géographique au sein de la fonction publique ou vers le secteur privé.
« Sur la réforme de la #FonctionPublique nous avançons depuis février 2018, je mène des concertations depuis un an. Cette réforme importante est l’une des briques de la modernisation de l’action publique. » @olivierdussopt @telematin pic.twitter.com/5yoOvMZ4ym
— Fonction publique (@dgafp) 15 janvier 2019
Renforcer la prise en compte du mérite
Depuis le début des discussions sur la réforme de la fonction publique, l’exécutif veut renforcer la prise en compte du mérite dans la rémunération des agents. Depuis un décret de 2014, il est possible d’introduire dans le calcul du régime indemnitaire des primes individuelles annuelles en fonction de l’engagement professionnel des agents publics. Mais ces primes au mérite, facultatives, sont encore trop peu utilisées. Olivier Dussopt le secrétaire d’Etat auprès du ministère de l’action et des comptes publics (voir tweet ci-dessus), a rappelé aux syndicats de la fonction publique que le gouvernement souhaitait pouvoir « gratifier davantage l’investissement au travail, sans pour autant mettre les agents en concurrence. ». Les syndicats de fonctionnaires sont peu enthousiastes à cette idée. Mylène Jacquot, en charge du dossier à la CFDT avertit « Il faut faire très attention à l’impact de ce genre de mesures sur la cohérence du collectif et sur les écarts de rémunération en homme et femmes. ».
Dématérialisation des documents
L’exécutif a publié un calendrier de documents qui vont être dématérialisés dans le but d’atteindre l’objectif des 100 % de démarches en ligne à l’horizon 2022 (Inscription en ligne sur les listes électorales et expérimentation pour les ordonnances médicales en 2019, guichet unique de création d’entreprise en ligne en 2021…). Il s’agit d’un enjeu majeur pour les organismes publics qui permettra de rattraper le retard sur ses voisins scandinaves.
Le gouvernement devra faire preuve de prudence dans un temps déjà bien difficile, et être à l’écoute des revendications des uns et des autres pour ne pas donner encore un peu plus de poids au mouvement social en cours. Des syndicats de fonctionnaires ont déjà appelé mardi, jour du grand débat national, à la « suspension » du projet de loi relatif à la fonction publique.
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